Exposition Individuelle de Jean-François Dubreuil à la galerie St-Hilaire (anc. La Vitrine) du 20 avril au 22 juin 2013

Exposition Individuelle de Jean-François Dubreuil à la galerie St-Hilaire (anc. La Vitrine) du 20 avril au 22 juin 2013

Exposition Individuelle de Jean-François Dubreuil à la galerie St-Hilaire du 14 novembre 2020 au 16 janvier 2021

Exposition Individuelle de Jean-François Dubreuil à la galerie St-Hilaire du 14 novembre 2020 au 16 janvier 2021

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Biographie

Né en 1946 à Tours (F). Vit et travaille à Paris.

En 1975, avec un groupe de peintres, il participe à la création d'une galerie associative, la Galerie 30, qu'il codirigera jusqu'à sa fermeture en 1987.

Depuis il travaille régulièrement avec plusieurs galeries françaises et étrangères, principalement la galerie Lahumière à Paris, la galerie St-Hilaire à Fribourg (CH), la galerie Nathalie Clouard à Rennes et la galerie März à Mannheim (D).

Depuis 1974, son travail repose exclusivement sur un système défini qui implique que tous ses travaux seront la transcription de journaux d’informations. Partant de ce principe, ses réalisations sont le report, sur toile ou papier, des surfaces de supports d’information imprimés : quotidiens ou hebdomadaires nationaux, régionaux ou étrangers, dont il traite soit la une, soit la totalité du journal.

En 2011, L'Espace de l'Art Concret à Mouans-Sartoux (F) / Donation Albers-Honegger, consacre son exposition FACE A FACE à Jean-François Dubreuil, dont certaines oeuvres font partie de la collection du musée.  Interview à découvrir ici : https://vimeo.com/23907301

En 2016, Jean-François Dubreuil reçoit le Prix Aurélie Nemours remis par la Fondation Nemours dont le siège est à l’Institut de France à Paris

À l'origine de toute composition de l'artiste français Jean-François Dubreuil, il y a un journal, un titre de la presse écrite. Mais c'est dans le champ de la peinture, maniant châssis, toile, pinceaux, pots de couleurs aux mélanges maison, que l'artiste transpose le journal, cet objet familier et populaire, ainsi que son contenu, faisant tout disparaître, papier, caractères, infos, reportages, photos, publicité, météo et programme télé, dans des surfaces de couleurs vives.

Fidèle au protocole arrêté, à la maquette du journal - que ce soit la Une qu'il traite ou l'édition dans son entier - et à l'échelle des différents espaces qui compartimentent la surface, il jongle entre système et hasard, entre contraintes assumées et surprise des résultats visuels, savourant la liberté offerte par le procédé élaboré une fois pour toutes.
Car le travail de Jean-François Dubreuil s'inscrit dans la durée et le temps qui passe. L'élément récurrent que l'on retrouve dans ses compositions depuis le début de son activité artistique est le rouge, ce même rouge cadmium pur qui marque l'emplacement des publicités, couleur signalétique par excellence et qui tel un fil conducteur, traverse toute l'œuvre de Jean-François Dubreuil.

Avait-il conscience en décidant de suivre le courant de l'actualité qu'il serait l'auteur d'un aussi vaste programme, d'une œuvre plastique qui, à l'image des titres traités sans hiérarchie spécifique, déjoue les frontières régionales et nationales et s'adresse à chacun, éclatante et surprenante ? Laurence Fasel, novembre 2020


Chemins de couleurs

Laurence Fasel

Lorsque Jean-François Dubreuil parle de sa peinture, il dit volontiers qu’il est un artisan, et qu’au fond, il fabrique des tableaux. Manière de se définir qui résonne de manière étrange au cœur d’une époque où peintres,  plasticiens et artistes de toute discipline ont tendance à parer chacun de leur acte créateur d’une dimension essentiellement égocentrique, subjective et auréolée d’inédit. Modestie exagérée ? Effacement simpliste ? Cette apparente simplification, à laquelle font écho la facture et la représentation de ses toiles, renvoie au contraire à un processus réflexif délibéré, en concordance avec le mode d’expression choisi, et à la portée pratiquement philosophique.

Devant ses œuvres, une description objective s’impose. Agencementde formes rectangulaires, plages de couleurs disposées en aplat, lignes suivant un réseau orthogonal, diagonales marquant les espaces, lecture claire des surfaces colorées. Inutile d’user de métaphores, cela serait contraire au parti-pris objectif de Jean-François Dubreuil et de l’art concret auquel on peut le rattacher.

Une fois passée la description initiale, indispensable à l’appréhension d'une œuvre, le spectateur s'interroge. Que représentent les tableaux de Jean-François Dubreuil ? Depuis bientôt 40 ans, ce peintre développe et poursuit fidèlement le programme qu’il s’est fixé, à savoir la transcription picturale de journaux d’information, soit leur une, soit l’ensemble de la publication, sur une toile. L’artiste soumet sa démarche précédant l’exécution proprement dite à des règles quiprécisent et définissent  l’objectif de la réalisation du tableau. A ce titre, il s’inscrit clairement dans la ligne des artistes construits, dans la mesure où, expérience extrême, le respect du protocole défini amènerait un tiers à une réalisation identique à la sienne.

Mais ce serait négliger l'importance que l'artiste accorde à son ouvrage de peintre, car nonobstant l'origine conceptuelle de sa démarche, Jean-François Dubreuil aime à souligner qu'il « reste toujours attaché aux fondements de la peinture », châssis, toiles, pigments, pinceaux, tous ces éléments auxquels s'ajoutent la jouissance du geste réitéré dans l'apposition des couches de peinture et le choc esthétique devant la toile terminée.

 Jean-François Dubreuil travaille par série. Et ceci depuis le début. Il peut par exemple décider de transcrire en une série de tableaux un même titre, quotidien international, national ou régional, analysé sur plusieurs jours consécutifs. Il peut choisir au contraire de traiter et de réunir différents journaux d’une même date à l’intérieur d’une série commune. Retenir sinon la une d’un journal, qu’il déclinera en plusieurs toiles, sous forme de surfaces pleines, de diagonales doubles et/ou simples, orientées uniformément ou disposées aléatoirement, etc.  Salecture quantitative d'un support d'informations (titre générique que l’artiste donne à toutes ses œuvres et à bien des niveaux révélateur de son projet) peut tout aussi bien se limiter à une seule toile, formant dans ce cas une série d'une unité 

Les couleurs sont essentiellement utilisées comme code pour différencier les espaces et non pas à des fins symboliques ou optiques. Dans son système chromatique, le gris est réservé aux titres, le noir aux photos, le rouge aux publicités. Quant aux autres couleurs, souvent très vives, elles peuvent être, selon son idée préliminaire, rapportées d'une toile à l'autre à l'intérieur d'une série. Une autre fois, les espaces identiquement marqués d'un tableau à l'autre recevront des couleurs différentes, au gré du tirage au sortauquel l'artiste soumet ses choix. Mais là aussi, c'est sans aucun doute à l'attachement profond de l'artiste à la peinture età sa dimension plastique que revient l'harmonie des couleurs pourtant juxtaposées en fonction du hasard. Sa main et son regard ne sauraient le conduire là où il ne sait pas où il va.

Contraintes d'un système définitivement établi, contrebalancées par le jeu et la surprise esthétiques du hasard, rigueur et contrôle neutre de la composition sublimés par la dimension plastique du tableau : en fondant sa peinture sur une grille d'analyse permanente, Jean-François Dubreuil libère son geste de toute portée subjective et émotionnelle pour laisser la  place à la peinture à son niveau le plus élémentaire.  Ainsi au jeu de va-et-vient entre contraintes et liberté répond le passage du concret à l’abstrait, du matérielà des figures d’abstraction. Par son analyse des pages de journaux, il opère un glissement d'un support matériel dont l'existence représente la métaphore de la réalité vers une œuvre abstraite, hautement expressive par le laconisme de sa forme.   

Ce processus d'épurement et de distanciation s'accompagne de façon significative d'un effacement du geste du peintre. Dans les œuvres de Jean-François Dubreuil, dans leur facture, il n'y a pas de trace de ce qui est antérieur à la toile, pas de trace de son travail, de sa personne. Aucune forme de repentir ni trace d'accidents, effets imprévisibles qui seraient contraires à sa démarche. 

De toile en toile, une combinaison de lettres issue d’une progression alphabétique identifie chaque série et l’inscrit, à travers cette immatriculation, dans une chronologie ininterrompue et sans fin, à l’image de l’œuvre en devenir de l’artiste. Chaque sériese trouve ainsi intégrée dans un projet sériel plus conséquent, apparenté au temps qui s’écoule sans retour possible. De même que les événements relatés par les journaux font l'histoire et appartiennent déjà au passé, de même chaque œuvre de Jean-François Dubreuil marque un moment, révolu. Une fois un tableau terminé, qu'est-ce qui pousse un artiste à le contempler, puis à recommencer ? Ne serait-ce pas la marche du temps dans laquelle il est pris